Bienvenu(e)s sur ce blog dédié aux mythes, contes et légendes classiques mais aussi à la fantasy et à la science-fiction (notamment contes de SF et suites futuristes de légendes, dans mon livre "Les mémoires du Galaxytime").
Je suis fan de ces légendes de créatures Yokai de la mythologie japonaise.
Les kappa (sans doute parmi les yokai les plus connus après les tengus), seraient des démons ou génies des lacs, côtes maritimes, rivières, étangs et puits.
Caractéristiques générales
L’aspect physique des kappas et celui de tortues humanoïdes avec des cheveux et un bec. Certains kappas sont dotés d’une peau de grenouille ou d’écailles, d’autres kappas portent une fourrure. La peau est souvent verte ou grise. Les mains et les pieds sont palmés, le kappa possède des griffes. Le kappa aime jouer de méchants tours aux gens, mais il est aussi et paradoxalement très poli.
Les kappa adorent jouer au sumo et au shogi (jeu d’échecs japonais), visiblement leurs 2 grandes passions. Ils seraient par ailleurs d'excellents nageurs. Ils possèdent une force physique surhumaine (supérieure à celle d’un bœuf), mais leurs os des bras sont constitués de telle manière que parfois ils se font arracher un bras en combat si leur adversaire tire sur leur bras, le kappa sait de toute manière que son bras finira par repousser. Les kappas ont la réputation de chlinguer le poisson au point de pouvoir détruire les nerfs olfactifs des humains. Les os du kappas sont solubles dans l’eau, c’est pourquoi il est impossible de trouver un squelette de kappa au bord d’une rivière. D’après les pêcheurs les kappas feraient plus d’un mètre de haut (mais resteraient relativement petits et pèseraient près de 50 kilos.
Le sommet du crane des kappas est tonsuré : par un petit trou à cet endroit rentre de l’eau à laquelle les kappas doivent leur puissance. D’aucuns pensent que cette tonsure au sommet du crâne des kappas serait en fait une allusion à la tonsure des moines catholiques occidentaux (divers missionnaires occidentaux avaient été en contact avec un certain nombre de japonais déjà vers les années 1600 et quelque).
Les kappa aimeraient noyer les enfants dans les rivières, mais aussi les bœufs et les chevaux. Quand sa victime est dans l’eau , le kappa aime lui extraire et dévorer les intestins en commençant par l’anus. D’aucuns dans divers ouvrages sur les yokai expliquent qu’ainsi le kappa soutire l’âme de sa victime. (1)
Les kappas sont fanas de concombres , ils en piqueraient même dans les champs et jardins des gens, d’oû aussi sans doute le nom d’un sushi maki au concombre : le kappa maki.
les kappas possèdent trois orifices anaux, pour se défendre à coup de pets très odorants si un pêcheur les capture (il arrive dans certains récits qu’un pêcheur remonte sa ligne et trouve un kappa suspendu au bout de son fil de pêche).
Les femmes en jupe devraient faire attention aux kappas : ces derniers adorent aller regarder sous les jupes, paraît-il…..(mais aussi les kappas aiment mettre les femmes humaines enceinte, de gré ou de force). La seule possibilité de reproduction des kappas c’est l’accouplement avec un être humain.
Les kappas peuvent aussi se transformer en humain, en objet ou en animal pour tromper leurs futures victimes. Le kappa aime jouer des mauvais tours aux gens : du genre les inviter à jouer avec lui à des jeux d’adresse ou de force au bord de l’eau afin de le jeter par surprise dans l’eau.
Le kappa aimant les milieux aqueux, il lui arrive de se cacher au fond des toilettes pour surprendre sa victime. Le kappa chercherait souvent à prendre le « shirikodama » de sa victime (une supposée boule magique qui se situerait quelque part vers l’anus des êtes humains.
Il existe une méthode éprouvée pour se débarrasser à coup sûr d’un kappa ? En lui pétant dessus. Il paraîtrait que le pet lancé par un kappa soit extrêmement redoutable, cela dit je n’ai pas connaissance d’éventuelles « batailles de pets » qui auraient opposé un humain à un kappa…)
Mais ceux qui n’ont pas mangé assez de flageolets pour ça peuvent se rassurer car il y aurait d’autres autres moyens, plus difficiles toutefois, de venir à bout d’un kappa :
A) le saluer pour le faire s’incliner bas afin qu’en nous rendant notre salut l’inclinaison de sa tête fasse tomber sa réserve d’eau vitale par le trou situé au sommet de son crâne (le kappa est poli, il se sentira donc obligé de rendre le salut. (2) Une fois que le kappa sur la terre ferme a ainsi perdu l’eau de son sommet du crâne il est très affaibli et il se fera alors un point d’honneur de tenir la promesse que lui proposera son interlocuteur humain (le kappa ayant un grand sens de la probité », il tient ses promesses).
B) au combat de sumo (mais dans ce cas il faut être meilleur en sumo que le kappas qui est un combattant aguerri dans cet art).
C) les kappas craignent le feu
D) certains rituels magiques utilisant un concombre
La politesse des kappas , renforçant l’ambiguité du kappa, s’exprime aussi d’autres manières : le kappa peut donner du poisson, aider aux travaux agricoles soigner les fractures osseuses (et enseigner cet art de guérison) aux gens qui lui ont rendu un service ou qui l’ont sauvé d’une mort certaine. Dans ce cas les kappas se font un point d’honneur à tenir leur promesse envers la personne qui les a aidés.
En effet les kappa ont le goût du jeu et aiment donc défier les humains de diverses manières.
Le kappa peut aussi, quand ça le chante, provoquer des inondations pour embêter les humains.
Le kappa possède le pouvoir de se rendre invisible, il peut ainsi se rendre invisible et attaquer sa victime par surprise (note personnelle : il est connu que les yokai étant des esprits, ils ont une face visible/concrète et une face invisible, toutefois il semblerait que tout le monde ne puisse voir un yokai à tout moment, la possibilité de voir un yokai semble dépendre non seulement des personnes possédant ce don, mais également des lieux et des moments). Les kappas ont aussi le pouvoir d’envouter leur victime (seuls des moines ou des ascètes yamabushi peuvent désenvouter la victime).
Divers kappas selon les régions
Au délà de ces caractéristiques relativement communes à tous les kappas, Il existerait plusieurs autres sortes de Kappas, et assimilé , selon les régions. Voici quelques exemples parmi d’autres:
A)les « Hyosubé « à Kyushu qui sont liés aux inondations et qui auraient tous pour sensei ….un humain charpentier….
B) Hyotoku : un enfant lié au puits
C)Garrapa : sur certaines îles du sud japonais et le fief de Satsuma, une sorte de kappa mais version grenouille aux longues jambes, il peut permettre des pêches fructueuses, vit dans les eaux et les montagnes et joue au sumo avec les enfants. Ces garrapas seraient dieux de la montagne et auraient une technique secrète de sumo qui leur permettrait de battre les kappas des autres îles.Ils aiment égarer les voyageurs et il paraitrait qu’apercevoir un kappa Garrapa peut entrâiner la mort.
D) Gawappa : la légende affirme qu’en été il se rendent au palais sous marin de ryujin le roi dragon (cf mon vieil article blog sur Ryujin )
E ) Ichimoku nyudo : des « kappas cyclopes »
F) Medochi: ce kappa se transforme en femme humaine pour séduire ses victimes et les attirer ainsi au fond de l’eau.
G ) Shibaten ; ces kappas là vivent dans la province de Tosa, ils sont considérés comme quasi invincibles en sumo.
H ) yamawaro : kappa qui migre en montagne l’hiver , il peut, comme certains tengus provoquer des illusions auditives pour tourmenter les voyageurs montagnards et forestiers. Ils font des trous dans les parois des maisons se trouvant sur leur route
Et d’autres encore… (au total il existe 80 variantes régionales de kappas)
On pourrait également citer Mitsunchi (créature aïnou empruntant certaines caractéristiques des kappas) ou encore le tigre d’eau « Suiko » qui est une sorte de demi frère du kappa.
Origines des kappas
Dans son Ouvrage, Sylvain Jolivalt relate deux mythes expliquant l’origine des kappas.
Dans le premier Hidari Jingoro devait construire un château pour un seigneur/ Manquant de main d’œuvre il fabriqua 99 poupées de paille hautes comme un enfant, il leur donna vie et une fois le château construit il jeta ces poupées vivantes dans la rivière. Ces dernières demandèrent à Jingoro ce qu’elle pourraient y manger, l’architecte leur répondit avec ironie qu’ils n’avaient qu’à manger des trous du cul… ainsi naquirent les kappas qui avaient pris cette suggestion à la lettre en se mettant à manger les orifices anaux des gens. .
Dans la deuxième, les kappas venaient du Fleuve Jaune en Chine, ils élurent domicile dans la terre de Kyushu qui leur semblait plus propice à leur développement. Une fois établis , de nouveaux kappas naquirent , ils étaient 9000 kappas au total. Le chef des kappas se nommait kusen bo, Ils pillaient les plantations des humains et enlevaient leurs femmes et leurs enfants. Alors Kato KIYomasa, seigneur de Kumamoto mobilisa des singes contre les kappas, Une fois repoussés les kappas s’établirent dans le fleuve Chikugo qui était voisin, le seigneur local , Kobayakawa autorisa Le chef kappa et les kappas à y rester, ils furent alors les émissaires de Suitengu (Tengu aquatique ? ) qui veillait contre les inondations.
Jolivalt relate aussi d’autres mythes d’origines des kappas : descendants probables des ainous, en tous cas les kappas sont très vraisemblablement liée à Mizuchi (divinité aquatique), ou encore decendants du « roi céleste Bucéphale »… Etc…
Freeman évoque un autre origine possible du mythe des kappas : des fœtus et bébés humains abandonnés dans les rivières.
Les histoires anciennes de kappas sont innombrables, cela prendrait des pages et des pages. De nombreuse actuelles légendes urbaines japonaises évoquent de présumés signes de présence récente de kappas.
Il reste sans doute d’autres choses à dire sur le sujet et il se peut que des erreurs de soient glissées dans cet article (je ne suis pas expert en culture japonaise), mais voilà l’état actuel de mes recherches sur le sujet.
Par Bunowa Rêveur le 03/09/2013
(il s’agit d’une version remaniée et complétée d’un article que j’avais publié en janvier 2010)
Sources : Shigeru Mizuki : son dictionnaire des yokai (volume 1 et 2 )
Sylvain Jolivalt : 3esprits et créatures fabuleuses du Japon : rencontres à l’heure du bœuf »
Richard Freeman « the great yokai encylopaedia”
Notes:
(1) Je vais vous épargner un laius sur le haragei , mais dans la culture japonaise traditionnelle la région du ventre est considérée comme le siège central des émotions et de la conscience de l’homme. Je pense également important de souligner qu’il est parfois relaté ça et là que certains tueurs professionnels et ninjas du japon médiéval aimaient à tuer leur victime/cible en lui enfonçant un pieu dans l’anus, après avoir attendu leur proie en se cachant au fond du trou des latrines en guettant le moment opportun où la victime allait se déculotter pour faire ses besoins. J’ignore quel est le degré de véracité historique de ces récits et je ne sais pas si le mode opératoire du kappa est une allusion ou non à cela. En tous cas mutiler les intestins de quelqu'un équivalait donc probablement dans le japon ancien à s’attaquer à la conscience de sa victime. Peut-être cela revient il symboliquement à lui ôter ainsi toute possibilité de vie après la mort ? En tous cas Freeman précise que la plupart des victimes des kappas sont retrouvées affichant un large sourire hébété (donc un peu comme s'ils venaient de perdre leur conscience).
(2) le kappa est ambigu, ni vraiment méchant ni vraiment gentil, il respecte une certaine étiquette (rei-gi ou reishiki) qui permet certes d’éviter des conflits inutiles, mais aussi (pour celui qui en maîtrise bien les codes) de faire passer habilement telle ou telle chose « en enrobant » de manière à ne pas froisser l’interlocuteur (voire parfois à duper, mais en veillant à tenir quand même ses promesses, c’est donc du grand art de diplomatie….). La notion de droiture d’âme (Gi) , de respect de la parole donnée, semble avoir été très importante dans le Japon ancien et de nombreux ouvrages du japon féodal la présentent comme une valeur d’origine confucéenne que le Japon féodal a ensuite adaptée (par exemple dans « le clair son des joyaux » du célèbre maitre Takuan). Le kappa de par son son coté ambigu et farceur peut faire penser à l’ambiguité des gobelins et autres lutins farceurs des légendes d’occident, d’ailleurs dans son guide des yokai , Richard Freeman parle de « gobelin des eaux » au sujet du kappa).