Bienvenu(e)s sur ce blog dédié aux mythes, contes et légendes classiques mais aussi à la fantasy et à la science-fiction (notamment contes de SF et suites futuristes de légendes, dans mon livre "Les mémoires du Galaxytime").
La fourolle (parfois nommée feurolle ou encore forlore) constitue une créature propre aux légendes de Normandie.
Feu follet
Pour certains il s’agirait d’un feu follet malicieux dansant dans tous les sens, sur les cimes des arbres etc, taquinant et égarant ainsi le voyageur qui croise sa route. Cette fourolle serait en fait contrôlée par une homme caché un peu plus loin dans les buissons. Ce dernier animerait la fourolle à distance un peu comme on le ferait avec une marionnette. (Je ne sais pas si cette faculté de faire bouger les fourolles à sa guise est réservée ou non aux sorciers locaux, les carot/carats). En tous cas la légende voudrait que si l’on touche l’homme manipulant la fourolle, un simple contact du bout du doigt suffirait à le tuer sur le champ. (source : Léon de VESLY - Légendes et vieilles coutumes (1905) rapporté sur http://la.piterne.free.fr/textes/b013.html ).
Cette fourolle là fait donc partie de la famille des « rouge goule » (en patois « goule » signifie « gueule, tête ; visage », les « rouge-goule » sont les divers feux follets du folklore normand).
Spectre et esprit vagabond
Dans certains secteurs de la Normandie, le terme « la fourolle » désigne une femme nue que le sorcier à transformée en créature éthérée/spectre aux traits de femme intacts.
Amélie Bosquet relate une autre variante de fourolle : il s’agirait d’une femme en pénitence qui la nuit venue va au fond de sa cave et s’allonge nue sur le sol. L’esprit de la femme quitte alors son corps et vagabonde dans la nature, c’est la fourolle.
Origines et caractéristiques,
Il semblerait, à en croire le livre de A . Bosquet, que la majorité des légendes de fourolle se situent dans l’actuelle Haute Normandie.
Pour certains, la fourolle version feu follet serait en fait une femme punie pour avoir accordé ses faveurs sexuelles à un prêtre. Toutefois selon G Dubosc la transformation en fourolle représenterait une femme châtiée pour avoir couché avec un moine ou prêtre. Elle se trouverait sous le contrôle du sorcier berger (le carot/carimaras).
La fourolle version « spectre de femme nue » se retrouve condamnée à errer ainsi dans la nature pendant dix ans. Elle saute sur les cavaliers qu’elle croise.: une femme fantôme peut-elle toucher les hommes sans qu’eux ne puissent la toucher ? Ou est il aussi impossible à la fourolle de toucher les humains ? Ce n’est pas précisé….. , elle admire son propre reflet à la surface des étangs, etc…
Que se passe-t-il quand une fourolle bondit sur un voyageur ? La fourolle saute sur la croupe du cheval du voyageur, agace le cavalier , puis repart. Contrairement à la milloraine (cf mon article sur la milloraine ici http://www.benoitreveur.info/article-la-milloraine-109811361.html ) , il arrive rarement que la fourolle en profite pour entraîner le voyageur dans un quelconque précipice ou plan d’eau.
La fourolle redevient femme de chair et de sang au bout de dix ans (ou sept ans selon les versions). Mais au terme de cette période, il se pouvait parfois que la femme doive rempiler pour dix ou sept ans de plus à « courir la fourolle » .
Conjuration de la fourolle.
Il existe diverses manières permettant à la femme de ne plus être fourolle et de redevenir femme à part entière, sans patienter les dix ou sept ans réglementaires.
Si la fourolle s’assied sur le cheval à l’arrière d’un voyageur, il suffit à ce dernier de planter en terre son bâton au sommet duquel il accrochera la fourolle qui le laissera ainsi tranquille.
Bien que la fourolle éclaire dans la nuit, les ombres vacilleraient à proximité de la fourolle, il suffirait de piquer cette ombre avec une pointe en fer ou de prononcer le nom de femme de la fourolle pour que cette dernière redevienne femme à part entière (mais dans ces deux cas il lui faut débuter sa pénitence à nouveau, je ne sais pas si elle doit reprendre à zéro ou si elle reprend pour le nombre d’années qu’il lui restait avant le délai des sept ou dix ans).
Contexte culturel :
Il semblerait, à en croire le livre de A . Bosquet, que la majorité des légendes de Fourolle se situent dans l’actuelle Haute Normandie.
Le nom anglais pour la fourolle est forlorn ou encore faulau, foulau.
Amélie Bosquet explique que l’on dit qu’une femme est « condamnée à courir en fourolle » pour se racheter d’avoir eu des rapports charnels avec un homme du clergé. Dans son ouvrage , A Bosquet relate ensuite que dans le pays de Caux, il était fréquent de désigner les femmes ou filles soupçonnées d’avoir eu des liaisons de ce genre en les nommant « la fourolle Marie, la fourolle Jeanne « , etc (selon le prénom de la fille suspectée. C’est ainsi que la médisance villageoise colportait de tels ragots sur telle ou telle fille du coin.
La fourolle fait partie de la famille des feux follets normands : les « ardents » et leur vaste famille de feux follets divers.
En Basse-Normandie et dans le Perche , il semblerait qu’on ne dise pas « la fourolle » , mais « la félo « . .
En Seine maritime on dit les « rouge-goules » (la « goule «, comme expliqué précédemment, constituant une variante locale du terme « gueule », cf mon article sur la gargouille ici http://www.benoitreveur.info/article-la-gargouille-110024829.html ).
Il semblerait que « Fourlore « soit le terme pour désigner l’équivalent masculin de la fourolle (du moins dans la livre d’A Bosquet, une note de bas de page précise que
Le lexicographe Nicot pensait que « fourolle venait de « pharol » (lanterne d’un port ou d’une galère) ayant donné ensuite comme synonymes « pharot « et « phalot »…. Et l’on retrouve « faulau » et « falot » pour désigner les feux follets….
Sources :
G Dubosc « la sorcellerie normande « (un extrait est disponible ici http://www.bmlisieux.com/normandie/dubosc13.htm )
Léon de VESLY - Légendes et vieilles coutumes (1905) rapporté sur http://la.piterne.free.fr/textes/b013.html
Amelie Bosquet « légendes de Normandie »